Par Mbagnick DIOUF
« Il y a très peu de registres de cancers réellement fonctionnels en Afrique. » Informations livrées par le Dr Issoumouha Dille, chargée de la lutte contre le cancer au bureau régional de l’Oms Afro.
Elle était l’une des invités du 5ème webinaire de l’année 2024 des journalistes membres du Réseau des médias africains pour la promotion de la santé et de l’environnement (REMAPSEN) sur le thème « Les cancers de l’enfant en Afrique. Parlons-en ». Elle estime que dans les pays de l’OMS Afro, il y a très peu de données sur les cancers de l’enfant et que les chiffres sont souvent sous-estimés.
En effet, poursuit-elle Il n’y a pas plus de 5 registres en Afrique subsaharienne qui fonctionnent de manière correcte. Elle précise par ailleurs que mêmes ces registres n’enregistrent pas les cancers de l’enfant car les cancers de l’enfant sont enregistrés dans des registres particuliers. Ce qui constitue un véritable problème.
Toutefois, des démarches sont faites pour essayer de chercher des solutions. Surtout avec l’appui de certaines organisations comme le groupe franco-africain d’oncologie pédiatrique dont beaucoup de pays d’Afrique francophones sont membres. Malgré cette absence de chiffres exacts, le Dr. Dillé révèle que l’on peut retenir que des milliers de cas de cancers de l’enfant sont diagnostiqués par an
« Nous savons qu’en règle générale on a 400 000 cas de cancers de l’enfant diagnostiqués par an. 90% de ces cas qui se trouvent dans les pays à revenu faible et intermédiaire dont fait partie l’Afrique subsaharienne. Nous savons également qu’un enfant sur 500 en moyenne développera un cancer durant sa vie. L’incidence c’est 50 à 200 pour environ un million.»
Jusque-là, peu de cas de mortalité due aux cancers de l’enfant sont rapportés dans nos pays. Disposer de la réalité des chiffres permettrait de mener des actions car, tant que les pays n’auront pas les données exactes, les cancers de l’enfant ne seront jamais un problème de santé publique. C’est dire que l’absence de registre de cancers de l’enfant dans certains pays de l’Afrique subsaharienne est un problème urgent à résoudre pour faire face à ce fléau.
C’est justement dans ce sens que le deuxième panéliste, le pédiatre-oncologue, Pr. Atteby Jean-Jacques Yao, par ailleurs, Chef du Service d’oncologie pédiatrique à l’Hôpital Mère Enfant de Bingerville (Côte d’Ivoire) parle de défis à relever. « Il y a l’ignorance qui est double. Elle est à la fois dans la communauté avec certains parents qui ne comprennent pas et des agents de santé qui ne savent pas faire le diagnostic. D’où le besoin de formation et d’encadrement des acteurs de la prise en charge. Il y a également le problème d’accès plus facile aux médicaments. »
D’ailleurs, précise le pédiatre-oncologue : des programmes sont mis en place dans nos Etats pour former des médecins de proximité sur les techniques de diagnostic de ces cancers. Il appelle également aux parents d’être plus réactifs pour amener les enfants le plus tôt possible dans les structures de santé pour que ces derniers puissent bénéficier de soins précoces et une chance de rémission.
« Pour le parcours de soins, en général, ce sont des enfants que nous recevons assez tardivement. Deux enfants sur trois sont reçus à un stade un peu tardif c’est-à-dire à un moment où la maladie s’est déjà exprimée et beaucoup évoluée. » Plaide-t-il.
Pour aider les enfants, leurs familles et la communauté à réduire les souffrances, Il faut nécessairement un engagement au plus haut niveau mais aussi une implication de toute la communauté pour mieux comprendre les signes des cancers afin de se rendre précocement dans les structures de santé.