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1-Vous avez mené des enquêtes, avec l’appui d’IBP sur les difficultés que les femmes handicapées rencontrent en matière de santé de la reproduction. Dites nous ce que ces enquêtes ont révélé ?

Dans le cadre du projet sur l’accès des femmes handicapées de la reproduction, avec l’accompagnement du partenaire International budget Partnership, nous avons commencé par une enquête au niveau des départements de Dakar, Guédiawaye, Pikine et Keur Massar. Ces enquêtes ont ciblé 76 femmes handicapées ainsi que 27 structures médicales de ces localités. Ces enquêtes ont également révélé que les femmes et jeunes filles handicapées ont de réels problèmes en matière d’accès aux services de santé de la reproduction. Ces enquêtes ont surtout montré que si on se base sur la pyramide sanitaire, l’offre de services et le niveau d’accessibilité sont plus adéquats au niveau des hôpitaux et répondent aux préoccupations des femmes handicapés mais au fur et à mesure qu’on descend au niveau de la base (centres de santé, postes de santé), ces services diminuent considérablement et ne répondent pas aux besoins spécifiques des femmes handicapées.

2-Est-ce que les difficultés constatées sont notées chez toutes les femmes handicapées ou bien chaque type de handicap a ses particularités ?

Les questions liées aux couts des soins sont presque communes aux femmes handicapées. Cependant chaque type de handicap a ses difficultés spécifiques : les femmes handicapées motrices ont des problèmes liés a l’accessibilité aux infrastructures sanitaires, le matériel médical n’est pas adapté car les tables de consultation ou d’opération ne sont pas toujours accessibles. Les femmes sourdes ont des problèmes de communication. Elles ne peuvent pas échanger avec le personnel soignant. Il faut un interprète en langue des signes et cela ne garantit pas toujours la confidentialité. Les femmes albinos, en raison de la fragilité de leur peau, rencontrent des difficultés (elles sont exposées aux infections). Il s’y ajoute que certains acteurs de la santé ne sont pas assez formés pour leur livrer certains soins. Les femmes aveugles ont besoin d’accompagnantes pour rejoindre les structures sanitaires. C’est autant de problèmes que rencontrent les femmes handicapées dans le domaine de la santé de la reproduction (SR).

3-L’Etat a mis en place la CMU pour justement aider les personnes vulnérables notamment les personnes handicapées, est ce que les femmes handicapées bénéficient totalement des avantages de la CMU ?

La CMU est un mécanisme mis en place pour la prise en charge des personnes vulnérables dont les personnes handicapées. Nous saluons la mise en place de ce filet social important. Mais pour ce qui est de la gratuité de la césarienne, l’acte est gratuit ainsi que quelques jours d’hospitalisation mais tout le paquet de services n’est pas gratuit et les couts ne sont pas toujours identiques dans tous les services de santé : c’est a ce titre que nous demandons que la CMU communique davantage avec les bénéficiaires de ses services et même avec tous les acteurs impliqués dans la prise en charge sanitaire. Nous portons surtout le plaidoyer pour que le paquet de services pour la césarienne soit gratuit pour les femmes handicapées.

4-Aujourd’hui, à votre avis, quel est le plaidoyer qu’il faut porter auprès des autorités pour améliorer la santé de la reproduction des femmes handicapées ?

La formation du personnel sanitaire sur le handicap qui doit être inclus dans les modules des écoles de formation du personnel sanitaire sans oublier l’interprétation en langue des signes. Nous estimons que toutes les structures sanitaires nouvellement construites par la direction des infrastructures et des équipements médicaux (DIEM) du Ministère de la Santé et de l’Action Sociale doivent etre à la norme standard internationale. Les équipements médicaux (tables de consultations ou d’accouchement…) doivent être adaptés aux besoins spécifiques des femmes handicapées. Il faut aussi rendre effectifs les programmes de filets sociaux comme les services de la Carte d’égalité des chances, la couverture de la maladie universelle etc. Nous plaidons également pour rendre accessible les services de la santé de reproduction depuis le niveau des postes de santé. Nous demandons la prise en compte des femmes et filles handicapées dans les supports de communication sur la santé de la reproduction (SR). Le plaidoyer concerne aussi l’application effective de la loi d’orientation sociale et le renforcement des services de la carte d’égalité des chances, qui est un filet social multi acteurs multi secteurs. La Couverture maladie universelle (CMU) doit avoir un plan de communication sur les initiatives de gratuité pour mieux informer les groupes vulnérables qui doivent bénéficier de ces services. Mais il n’y a pas que. Le plaidoyer concerne également les collectivités territoriales. Elles doivent procéder à des aménagements raisonnables des infrastructures sanitaires communautaires pour l’accès facile des femmes handicapées. Elles doivent également commander des équipements médicaux (tables de consultation gynécologique, table de consultation prénatal et tables d’accouchement) adaptés aux besoins spécifiques des femmes handicapées Leurs budgets doivent être sensibles au handicap.

5-Justement, qu’en est-il de l’application des décrets de la loi d’orientation sociale ?

Les personnes handicapées fondent beaucoup d’espoirs sur l’application la loi d’orientation sociale. C’est pourquoi il est urgent d’accélérer le processus d’application de cette loi. C’est vrai que plus de 70.000 personnes handicapées sont détentrices de la carte d’égalité des chances. Mais le processus d’octroi de cette carte doit être accéléré car toutes les personnes handicapées en ont droit (la carte permet tout d’abord d’identifier les personnes handicapées). Il s’y ajoute que les services liés à la carte ne sont pas effectifs pour toutes les personnes handicapées qui en ont besoin. La Cmu a procédé à l’enrôlement de certaines personnes handicapées mais il y’a une majorité qui attend. Nous saluons la mise à disposition de cartes de transport par la société Dakar Dém Dikk (DDF). Nous souhaitons aussi que de telles mesures puissent être appliquées au niveau des régions. Nous portons le plaidoyer pour la signature des textes d’application restants : il s’agit de 08 décrets et 3 arrêtés interministériels. Une bonne partie a été élaborée et déposée dans le circuit.

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